Bienvenue à Myrelingues
Guignol et Madelon
- Arrête de bajafler,
fenotte, chasse plutôt les bourrons qui sont sous le lit !
- Grand marque mal, comment veux-tu que
j’y fasse, je me suis pas mise en sale !
- Au lieu de te petafiner la gaugne comme Carimentran, tu
ferais mieux d’y faire, pace que même le miron y n’ose plus se cacher dessous.
- T’es dur de la comprenette, ça fait deux heures de temps
que je me prépare pour aller trabouler à la Croix-Rousse.
- Ben, il faudra prendre du souci si tu veux attraper la
ficelle.
- On se fait péter la miaille avant que tu décabanes ?
- Ne me sampille pas comme ça, grand gognand, tu vas pas
broger pace que je débaroule un moment de cheu nous !
- Tu emboconnes l’eau de cologne, dis donc !
- C’est mieux que l’odeur des équevilles, pas vrai ?
- Ou celle des colombines de chrétien, c’est sûr ! Dis
donc, t’as pris des picaillons pour acheter un jésus ? On n’a plus rien
pour casser la graine, même pas des gratons.
- Toi, le gone, quand le mâchon te fait faute, tu fais
vilain !
- Prends aussi un
tablier de sapeur et de la cervelle de canut.
- Ah, ben non, tu iras, toi, chez la catolle qui en vend.
- Je croyais que tu voulais pas que je m’approche de cette
poutrone !
- Elle est cafie de bocons et elle carcasse, c’est juste, tu devrais l’éviter !
- T’as peur que je lui sois après et que ses quinquets
m’ensorcellent ?
- C’est une charipe plate comme un matefaim.
- Arrête de te brandigoler le cervelet, de testicoter pour
rien. Il n’y a pas mèche qu’elle m’embobine !
- Bon, alors, mon belin, à tantôt que viens !
- Ma grignette, bien le bonjour au gros caillou de ma part !
Céline (28 janvier 2007)
Traduction
Bienvenue à Lyon
- Arrête de bavarder, ma petite femme, chasse plutôt les
moutons (ou chatons) qui sont sous le lit !
- Grand voyou, comment veux-tu que je le fasse, je ne suis
pas en tenue de ménage !
- Au lieu de t’abîmer le visage en te maquillant comme un mannequin
de mardi gras, tu ferais mieux de le faire parce que même le chat n’ose plus se
cacher dessous.
- Tu ne comprends donc rien, cela fait deux heures que je me
prépare pour aller me promener en empruntant les traboules (couloirs obscurs
reliant des maisons) de la Croix-Rousse.
- Eh bien, il faudra penser à te mettre en route si tu veux
attraper le funiculaire.
- Qu’as-tu dans la tête ? Je vais
m’en aller, pas la peine de grogner.
- On s’embrasse avant ton départ ?
- Ne me chiffonne pas ainsi, grand
niais, tu ne vas pas te mettre à broyer du noir parce que je sors un moment de chez
nous.
- Tu sens l’eau de Cologne à plein nez,
dis donc !
- C’est mieux que l’odeur des ordures,
pas vrai ?
- Ou celle de la crotte, c’est
sûr ! Dis donc, tu as pris des sous pour acheter un saucisson (de
Lyon) ? On n’a plus rien à manger, même pas des résidus grillés de graisse
de porc.
- Toi, gamin de Lyon, quand tu ne peux
pas faire ripaille, tu protestes !
- Prends aussi un carré de tripes et du
fromage blanc aux herbes, à l’ail et au vin blanc.
- Ah, bien non, tu iras, toi, chez la
bigote racornie qui en vend.
- Je croyais que tu ne voulais pas que
je m’approche de cette créature !
- Elle est affligée de maladies et elle
tousse comme la cloche de Saint Nizier (église de Lyon), c’est juste, tu
devrais l’éviter.
- Tu as peur que je la courtise et que
ses yeux m’ensorcellent ?
- C’est une méchante, plate comme un
crêpe.
- Cesse de te tracasser, de me
quereller pour rien. Il n’y a pas à craindre qu’elle me séduise.
- Bon, alors, mon agneau, à tout de
suite !
- Ma petite, salue le gros caillou (rocher
de moraine resté sur place sur la colline de la Croix Rousse, la colline des
canuts ou tisseurs de soie) de ma part.
Céline (29 janvier 2007)